jeudi 31 juillet 2008

Le Santiago des sous-sols



Dans le métro, je savais les Parisiens trop pressés de s’animaliser pour se rappeler l’importance de l’espace minimum de respiration à laisser entre deux individus, et ceci au point de faire passer les wagons pour des camions à bestiaux. Je connais désormais les Santiaguinos, des monstres assoiffés de contacts corporels et métalliques, des maîtres dans l’art du collage dense de corps humains, des professionnels de la folie pure qui relèguent nos têtes à claques parisiennes au rang d’amateurs. Autant la marée humaine de Châtelet les Halles, au pic de la journée, donne la nausée, autant celle de Baquedano aux heures de pointe te rappelle à quel point il ne faut surtout pas que tu l’aies. Car si tu te sens mal et plies genoux, il n’y aura personne pour te relever et du monde pour t’écraser.

Le quai de gare se transforme en véritable champ de bataille où les combattants parviennent aux rames en différentes salves et piétinent les précédents assaillants blessés ou morts au combat. D’ailleurs, le prix du billet augmente aux heures de pointe : une mesure pour désengorger le métro et réduire les pertes humaines ? Bref, si le Parisien n’est pas un exemple de civisme, le Chilien du sous-sol (qui n’est pas le même que le Chilien de surface) en manque totalement. D’ailleurs, c’est bien simple, les wagons, au lieu de déborder de publicités, sont remplis d’appels au respect et à l’amabilité. « Montrez-vous sous votre meilleur jour », « Les employés du métro sont là pour vous aider, respectez-les », « Ne vous asseyez pas sur le sol» (car oui le Chilien s’assoit par terre)… Pire, le métro de Santiago emploie des personnes pour réguler le trafic, ce sont les hommes en jaune fluo. Le chef de ces joyeux lurons tient un mégaphone et vous hurle de rester derrière la ligne jaune marquée au sol. Car il faut les voir à l’œuvre ces bougres ! Et que je rentre dans la rame avant même que le premier voyageur n’en soit sorti, et que je fais barrage de tout mon corps pour faire chier le pauvre type de derrière qui souhaiterait rejoindre le quai, et que je feints de ne pas entendre les « Excusez-moi ! »…

Mais ce qui est sympa, c’est que le combat est institutionnalisé : tout le monde s’entretue mais personne ne se plaint. Exemple. Quand on est au fond et que l’on veut sortir, plusieurs solutions s’offrent alors à nous. Soit on dit d’une frêle voix « Pardon » et autant attendre le terminus, soit on gueule fort en montrant de méchants yeux et autant pisser dans un violon, ou soit on joue des coudes – que dis-je des coudes ? Des pieds, des genoux, des poings, de la tête, de tout ce qui peut servir à taper et pousser – et alors on a une petite chance d’arriver sur le quai avant que les portes ne se soient refermées. Personnellement, hier, j’ai opté pour le balancer de Chilienne. Il y avait cette femme qui refusait de sortir pour me laisser passer. Mode d’emploi. 1. Posez calmement ses mains au niveau des omoplates de la personne récalcitrante ; 2. Froncez les sourcils et soufflez fort afin de vous placer en victime de la connerie humaine, victime qui n’a pour unique solution que l’emploi de l’action détaillé à l’étape suivante ; 3. Poussez violemment ce boulet ambulant hors du train ; 4. Sortez sereinement en n’accordant aucun regard à cette petite dame qui vient de finir sa course sur un gros monsieur mécontent ; 5. Jubilez intérieurement et soyez fier : vous vous trouver sur la voie de l’intégration chilienne !


El Huevón


samedi 26 juillet 2008

A year down under : la tête en bas



A près de dix fuseaux horaires et à plus de vingt heures d'avion de n'importe quelle capitale européenne, les Australiens fêtent Noël en été et partent au ski en juillet. Etat-continent d'un autre monde, l'Australie incarne l'ailleurs absolu et, à l'instar des Etats-Unis d'Amérique, le rêve d'une vie nouvelle où tous les espoirs sont permis depuis 1868, date de l'abolition de la dernière colonie pénitentiaire et seconde naissance pour la société australienne.

Cependant, si la distance stimule l'imagination et fait l'objet de multiples fantasmes, elle suscite aussi de nombreuses peurs. L'ethnocentrisme européen a souvent relégué le Pacifique Sud au rang de "bout du monde".

Méconnu et réputé hostile, le Pacifique Sud est resté une contrée mythique jusqu'au XVIIIe siècle, jusqu'à ce que les rivalités croissantes entre le Royaume de France et le Royaume d'Angleterre fassent de toutes les terres des cibles de conquête, mêmes les plus pauvres et les moins avenantes. Fin avril 1770, l'Endeavour de James Cook accoste dans une baie de la côte est australienne. Le 21 août 1770, le navigateur britannique prend possession de cette terre au nom du roi d'Angleterre George III et la baptise Nouvelles Galles du Sud (New South Wales). A travers leurs explorations et leurs récits, les aventuriers hollandais, anglais ou français ont inventé l'imaginaire austral, un imaginaire nourri par la découverte d'un monde nouveau envahi d'animaux et d'une végétation étranges.

Aujourd'hui encore, l'Australie fascine tout grand ou petit voyageur, tout véritable backpacker. Plus encore que l'éloignement géographique, c'est l'isolement de cette île-continent qui attire, car il donne aux Australiens, dit-on, un regard distancié sur le monde.


No Worries